En 1978, fort du succès de ses processeurs 8 bits, Intel lance son premier processeur 16 bits, le 8086 (premier processeur d’architecture x86, utilisée encore aujourd’hui sur la plupart des pc et mac). Le succès est à ses débuts loin d’être assuré, d’autres constructeurs lancent à la même époque leurs processeurs 16 bits (Zilog et le Z-8000, Motorola et le 68000,..) et aucun d’entre eux n’est assuré de devenir le nouveau standard.
Intel 8086 by Konstantin Lanzet . Licensed under CC BY-SA 3.0 via Wikimedia Commons
Afin que Microsoft ne perde pas de temps à adapter ses langages pour chaque architecture, Gates a l’idée de développer un « système d’exploitation universel » pour pourra fonctionner sur n’importe quelle architecture.
Microsoft se tourne alors vers UNIX, l’OS des laboratoires Bell écrit en C facilement portable d’une architecture à une autre et qui est à l’époque déjà devenu le standard des ordinateurs centraux. Après la récupération d’une licence UNIX chez AT&T, le développement de XENIX, variante Microsoft d’UNIX commence, Microsoft fait ses premiers pas dans le marché des systèmes d’exploitation.
Microsoft XENIX
Les problèmes se font rapidement ressentir lors du développement car UNIX est trop gourmand en espace disque et en mémoire pour les micro-ordinateurs de l’époque.
Un autre OS viendra indirectement d’un nouveau venu qui s’apprête à entrer sur le marché des micro-ordinateurs : IBM.
IBM, déjà présent sur le marché des ordinateur centraux, ne voit à l’origine pas l’intérêt d’un micro-ordinateur. En effet, qui voudrait d’un petit ordinateur ? Pour quoi faire ?
Le succès d’Apple change cependant la donne, et IBM commence à penser sérieusement à développer son propre système.
Les premiers modèles, conçues entièrement par IBM, du processeur au clavier, sont chers par rapport à la concurrence. (L’IBM 5100 est lancé à 11000 $).
« IBM 5100 – MfK Bern » by Sandstein – Own work. Licensed under CC BY-SA 3.0 via Commons
A l’été 1980, le projet “Chess” est lancé. Il s’agit là de concevoir le nouveau modèle de micro-ordinateur IBM de façon différente.
Afin de réduire les couts, les composants seront achetés à l’extérieur et IBM se chargera uniquement de l’assemblage final de la machine.
Par soucis de rapidité, le système d’exploitation ne sera pas non plus développé par IBM.
L’ordinateur utilisera un processeur Intel aura comme l’altair une architecture ouverte, permettant à n’importe qui de concevoir un périphérique pour la machine.
Cependant, par peur qu’Intel ne soit pas capable de fournir assez de processeurs, IBM les oblige contractuellement à autoriser une deuxième compagnie à fabriquer les processeurs 8088 : AMD.
Mi-1980, des représentants d’IBM, à la recherche d’un système d’exploitation et d’un BASIC, prennent contact avec Microsoft.
Gates et Allen les reçoivent avec Steve Ballmer, ancien ami d’université de Bill Gates et nouvellement arrivé dans la compagnie. Celui-ci est le seul employé ayant un profil plus commercial. A l’époque, pour des raisons de cout, IBM hésite encore entre réaliser un ordinateur 16 bits basé sur le nouveau processeur 8086 d’Intel ou se contenter d’un système 8 bits plus ancien. Les processeurs 16 bits allant plus vite, et ayant des capacités d’adressage de mémoire bien plus grande, Bill Gates propose un compromis. Intel propose également un processeur moins cher hybride, le 8088, qui est un processeur 16 bits en interne mais dont le bus est limité à 8 bits, limitant le flux d’information en entrée et en sortie du processeur. La machine ne sera pas aussi performante qu’une vraie machine 16 bits, mais elle fonctionnera mieux que les machines 8 bits, et le passage à un véritable processeur 16 bits dans le futur se fera sans problème de compatibilité.
Les négociations se poursuivent alors sur la partie software de la machine. IBM, sachant que Microsoft a développé la SoftCard permettant de faire tourner CP/M et Basic sur l’Apple 2, demande si Microsoft serait capable de faire quelque chose de similaire pour leur produit.
Microsoft n’a aucun souci pour fournir une licence pour BASIC et leurs autres langages, mais ils informent IBM qu’ils ne possèdent pas CP/M, et qu’il leur faut contacter Gary Kildall pour cela. A cette époque, Kildall et sa compagnie Digital Research développent déjà une version 16bits de CP/M pour le 8086 : CP/M-86.
Le lendemain, l’équipe d’IBM est à la porte de Digital Research mais Kildall n’est pas au rendez-vous. Ne voyant pas de raison de placer IBM au-dessus de ses rendez-vous déjà prévus pour la journée, il laisse sa femme et le reste de l’équipe de Digital Research recevoir IBM. Les négociations ne commenceront même pas : Digital Research refuse de signer le même accord de non divulgation que Microsoft a signé la veille. Le projet PC risque de s’effondrer, et IBM retourne chez Microsoft.
Chez Microsoft, Gates voit sa meilleure chance disparaitre. IBM, leur plus gros client potentiel, prêt à acheter tous les produits de la compagnie, risque de tout annuler s’ils ne trouvent pas de système d’exploitation 16 bits pour leur machine. IBM demande alors à Microsoft s’ils ne peuvent pas développer eux même le système d’exploitation. Gates pense que XENIX pourrait convenir à terme mais il faudra des années avant qu’il ne soit prêt pour le 8086.
Par chance, Allen connait un ingénieur de Seattle Computers, Tim Paterson qui, lassé d’attendre la sortie de CP/M-86, a développé son propre OS 16 bits : QDOS (Quick and Dirty Operating System).
Afin de créer QDOS, Paterson est parti d’un manuel CP/M, ce qui explique les similarités entre les OS. Cependant, même si largement inspiré de CP/M, il ne s’agit pas d’un clone. Paterson adopte FAT (un système de fichier pour disquette développé par Microsoft en 1977) comme système de fichier pour l’OS et simplifie également une bonne partie des commandes systèmes.
Microsoft achète à Seattle Computers les droits de modifier et revendre QDOS, renommé 86-DOS à l’occasion pour 10000$. L’accord avec IBM est alors finalisé, Microsoft recevra quelques centaines de milliers de dollars (le chiffre exact n’est pas connu) afin de fournir toute la partie logicielle de l’IBM-PC (mais Microsoft ne touchera rien sur les ventes d’IBM après cela).
Un an plus tard, l’IBM-PC est prêt, c’est un succès immédiat et d’autres compagnies du secteur commencent à être intéressées par l’OS choisi par IBM.
L’IBM PC 5150, au musée de l’informatique de Cambridge, Angleterre
Afin de contrôler les ventes de 86-DOS, Microsoft le rachète définitivement à Seattle Computers pour 50000$. Seattle Computers garde toutefois le droit de continuer à vendre des licences du système de son côté.
86-DOS devient alors MS-DOS.
Bon de commande de Seattle Computers pour la vente de 86-DOS à Microsoft
Digital Research, trouvant que MS-DOS ressemble beaucoup (trop) à CP/M, menace IBM et Microsoft d’amener l’affaire devant la justice. Afin de résoudre le problème au plus vite, IBM demande à Digital Research ce qu’ils souhaitent en compensation. Digital Research exige que CP/M-86 soit proposé en alternative à MS-DOS sur l’IBM-PC, un accord est alors conclu.
Malheureusement pour Digital Research, la question des tarifs n’a pas été abordée. MS-DOS est fourni gratuitement par IBM avec la machine, CP/M-86 en option payante.
CP/M, système d’exploitation standard des années 70, disparaitra rapidement au profil de MS-DOS.